COP21: le Vatican et le choix des armes

Y-a-t-il une relation entre désarmement et lutte contre le changement climatique? La 21e Conférence des Parties, organisée à Paris du 30 novembre au 11 décembre prochains, appelle des résolutions et une volonté concrètes, pour aboutir à des choix et des priorités.
J’ai écrit, il y a quelques semaines, dans une contribution intitulée « TPN:comment tenir les cavaliers de l’apocalypse » consacrée aux travaux préparatoires de la conférence quinquennale des Etats parties organisés à l’ONU, qu’une civilisation vertueuse dans l’écologie ne saurait être aboutie sans être vertueuse dans l’économie, le social, la politique et l’humanité et que, par conséquent, le degré de notre capacité à prendre acte de nos devoirs dans l’écologie ne pouvait pas être séparable du degré de paix. La real-politique qui régit le monde doit changer de nature. Le principe de réalisme doit évoluer afin que ce ne soit pas le monde lui qui finisse par devenir fiction de lui-même, écrivais-je alors.

Pour éviter que les choses changent pour que rien ne change, la conscience des devoirs doit être à la hauteur de nos ambitions. Le 29 avril dernier, dans les colonnes de L’Osservatore Romano, organe de presse du Vatican, un appel a été lancé aux dirigeants politique pour lutter contre le changement climatique.

La petite phrase du pape François sur l’extermination des Arméniens en 1915 « considérée comme un génocide », a focalisé davantage les médias que l’appel sur les exigences dictées par le changement climatique. Les médias ont des passions sélectives.

Réorienter les dépenses militaires
en investissements
pour le développement durable

Pourtant, à l’appel de l’Académie Pontificale des Sciences, dirigeants religieux et politiques, les scientifiques et les représentants du monde économique et social qui ont pris part le 28 avril au séminaire sur la protection de la planète, ont abouti à une déclaration formelle laquelle qualifie la prochaine conférence de Paris sur le climat (cop21)  de «dernière occasion concrète» pour négocier des mesures qui réduisent le réchauffement global dans «des limites sûres pour l’humanité, en protégeant dans le même temps les personnes pauvres et vulnérables du changement climatique constant qui met leur vie en grave danger».
Les signataires, sous l’égide du souverain pontife, placent les dirigeants de la communauté internationale  devant leur «responsabilité particulière d’approuver, au cop21, un traité courageux sur le climat». Responsabilité qui vise particulièrement les pays les plus riches qui «doivent aider à financer le coût de la lutte contre le changement climatique dans les pays à faibles revenus», en favorisant «une rapide transformation de la planète en un monde alimenté par des énergies renouvelables et par d’autres énergies à basse émission d’oxyde de carbone et par une gestion durable des écosystèmes».
Et c’est à ce niveau qu’intervient ce qui peut être considéré comme la clé du texte qui lie les enjeux du climat à une mutation consistant à réorienter «les financements publics des dépenses militaires vers des investissements urgents pour un développement durable».

Une des clés à Rome,
la serrure à New-York

A New-York, jusqu’au 22 mai prochain, se déroule la session quinquennale de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Si quelques mots issus de Rome fournissent une des clés au défi, une des serrures est entre les mains des acteurs du Traité de Non Prolifération. De la capacité à faire coïncider l’une à l’autre dépendra la qualité de notre avenir.
Les représentants d’ONG diverses et des Hibakusha, terme désignant les survivants des bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki, ont lancé un pladoyer en faveur « d’un traité interdisant la fabrication, la détention et l’utilisation de ces « armes inhumaines », traité qui serait la première étape sur la voie de leur élimination ».

Les acteurs du TPN  qui vont se succéder jusqu’au terme de la conférence ne peuvent pas faire l’objet de procès d’intention. Ils ont une double responsabilité de transition et de fermeté dont il faut appréhender l’ampleur en toute lucidité. Les menaces que fait peser le changement climatique sur l’humanité doit pourtant amener à ouvrir les yeux sur le défi qui s’impose, qui s’impose également à tous.
Il n’y a pas de petit doigt suffisamment large pour permettre à ceux qui seraient tentés de le faire, de se cacher derrière afin de développer des prétentions hégémoniques hors celles de l’hégémonie du service commun que réclame aujourd’hui et pour demain la planète et ses habitants.
Ceux qui cèderaient à la tentation de s’y soustraire, en s’adonnant à des calculs opportunistes, commettraient un crime moral contre l’humanité au moment où elle a besoin d’intelligence, d’intégrité, de concorde et de développement afin d’assurer au mieux une transition que nous aurions tort de ne pas considérer comme vitale et circonscrite à la seule question du climat.
C’est la nature de l’humanité qui, interrogée de toutes parts, est déjà en question.

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