« For those who may have forgotten what it means. »
Ce 30 juin 2025 à 13h40, le président Xi Jinping publie cette phrase sur son compte X, laconique mais chargée. Elle accompagne un extrait de débat citant la résolution 2758 de l’Assemblée générale des Nations unies, adoptée en 1971, qui reconnaît la République populaire de Chine comme seule représentante légitime de la Chine à l’ONU, et qualifie Taïwan de « province ».
La puissance d’un tel rappel ne réside pas tant dans la démonstration que dans l’intention. Xi Jinping ne cherche pas à convaincre — il réaffirme. Mais, contrairement à ce que certains pourraient croire, cette affirmation n’est pas tactique. Elle ne répond pas à une logique de manœuvre militaire ou diplomatique. Elle s’inscrit dans une intelligence du champ, non du plan. Il ne s’agit pas de tendre vers une fin prédéfinie, mais de modeler l’espace jusqu’à ce qu’il livre lui-même sa résolution.
Hier, le président chinois a cru bon de rappeler — sans qu’il soit besoin d’y voir un plan, ni une annonce — les jeux dont sont censés être maîtres les grandes puissances, respectivement les échecs, le jeu de Go et le Poker. La manière dont il a présenté les rangs de chacun, les Russes pour les échecs; les Chinois, pour le Go; les Américains pour le poker n’est pas à prendre au pied de l’énumération.
Le jeu d’échecs vise l’échec et mat. Le poker, la domination du bluff. Le Go, lui, étend la forme. Il ne détruit pas : il absorbe, il attire, il remodèle le champ adverse jusqu’à le rendre inexorablement connexe. C’est un jeu de plasticité. Et c’est dans ce paradigme que la Chine opère.
Le premier encombrant est déjà écarté : le Japon n’a jamais revendiqué Taïwan depuis 1945. Il y a même officiellement renoncé, dans le traité de San Francisco, sans ambiguïté ni retour.
Un problème évacué. Il faut dégager les encombrants.
Le deuxième encombrant, c’est la terre elle-même, dissociée des hommes qui l’habitent.
La Chine sait que la souveraineté ne se joue pas seulement sur le sol. Elle se joue sur la conscience. Ce n’est pas seulement la province qu’elle regarde, c’est la singularité politique qui s’y est développée. Une singularité issue d’elle, mais qui a pris forme ailleurs. Plus qu’une dissidence, Taïwan est un jumeau affirmé.
D’ailleurs, elle ne peut pas faire chair avec une terre considérée comme une province. C’est peut-être même ce que Xi Jinping porte à l’attention. La résolution de l’ONU qu’il cite, à l’attention de ceux qui oublient, rappelle, si on accepte de se placer dans l’esprit et non dans son doigt, que Taïwan n’est pas une province. C’est une continuité en retard d’elle-même, mais la condition humaine, n’est-il pas, finit par se faire la raison de réunir tout le monde.
À l’inverse des deux Corées, où l’une vit et l’autre s’enferme dans le théâtre sinistre de sa propre terreur — la Chine observe. Et elle tire une leçon de cette glaciation stratégique :
ce que l’Histoire a figé, elle ne le rend pas. Une anomalie quantique peut devenir permanente. C’est précisément ce que la Chine veut éviter.
Mais ce qu’il y a de singulier, ici, c’est que, contrairement à la péninsule coréenne, les deux Chines ont réussi. Le défi est encore plus grand.
La République populaire a tenu, redressé, transformé, porté.
Taïwan a prospéré, innové, séduit, résolu.
Il n’y a pas ici, et il ne saurait y avoir, de vainqueur ou de vaincu.
Il ne saurait y avoir qu’un seul gagnant : les Chinois, en un peuple réuni.
C’est là que s’impose le recours au modèle quantique.
La mécanique quantique enseigne que certaines particules peuvent exister en superposition d’états, jusqu’à ce qu’une mesure — ou une décision — vienne trancher.
Rien ne décrit mieux la situation.
Taïwan et la Chine continentale sont dans une superposition historique, culturelle, politique.
Avec, à l’origine, la brutalité d’une divergence, mais aujourd’hui, une corrélation complexe, oscillante, fragile, mais réelle.
Le problème ne peut être résolu par l’annulation d’un des états — cela provoquerait un effondrement du système pour rester dans cette dialectique.
Il ne peut être résolu que s’il s’ouvre à sa propre perspective :
celle d’un dépassement qui présente, de mon propre point de vue, dans l’imbroglio apparent des une fenêtre spéciale et, du désordre spatial, un alignement très particulier, dans ce sens où il n’est pas dans la ligne de droite, mais fait des beaucoup de courbures, y compris celle imprimée par le président Trump.
Est-ce délibéré et conscient n’est pas la question. Cela ouvre à la perspective une voie de résolution qui ne réside plus dans l’unité forcée, mais dans l’unification de sens.
Le territoire n’est pas l’enjeu. Seule la géographie le tient pour enjeu. L’histoire tient le peuple pour enjeu.
Le devenir du peuple chinois — dans toutes ses formes vivantes — l’est.
Et peut-être que ce que dit Xi Jinping, à demi-mot, dans son tweet, c’est cela :
« Souvenez-vous non pas de ce que vous devez faire, mais de ce que vous êtes. »
Et alors, ce que vous ferez — advient. Dans ma langue, on est ce qu’on devient et on devient ce qu’on est. Première liberté, garantissant les autres, présentes, en gestation, et plus lointaines à venir.
Si c’est bien ce que je lis c’est une preuve de mon intelligence qui, tout en me faisant plaisir, ne servirait que ma vanité. Si c’est bien ce que je lis dans l’intelligence placide de Xi Jinping, la portée ne se mesure à aucune aune sinon celle du devenir des contentieux territoriaux et de la résolution de morsures que le passé inflige aux nations et à leurs peuples.
C’est ce en quoi que je veux croire.
Une éclosion qui ne donne pas naissance à un monstre.
Pour ceux qui veulent en savoir un peu moins:
https://chatgpt.com/share/6862c2f5-ec58-800a-8259-517390b57b26
