Un compte X, intitulé « Bleu Blanc Rouge » ouvertement d’extrême-droite, propage les images d’un incendie qui se multiplie en France, favorisé par des conditions naturelles, avec le commentaire mis en index. Ces éléments d’actualité mettent en cause l’incivisme, l’inconséquence, la pyromanie délibérée ou involontaire, ou le coup du sort.
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« Qu’est ce que ça doit être flippant de te retrouver encerclé par les flammes comme ça ! 😳🤯
Courage aux sinistrés ! 🇫🇷😫 »
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Sous ses airs anodins, ce tweet au ton compatissant crée un lien émotionnel, dans une toile plus vaste, pour mieux injecter et fixer la peur sous son pouvoir anxyogène.
C’est le commentaire qui accuse sans accuser, désigne sans nommer, suggère sans démontrer.
C’est le flux continu de faits divers, devenus faits systémiques par le simple effet de l’itération émotionnelle.
Personnellement, l’incendie invisible me préoccupe plus que l’incendie visible.
Ce peut-il qu’il ait une corrélation « cognitive » entre eux? Cela pose la question de la pyromanie, des multiplications des actes pyromanes dans la diversité de leurs expressions, non pas comme un objet de psychiatrie isolé, mais comme le symptôme que quelque chose d’essentiel, au coeur du noyau, est déréglé et atteint les êtres les plus fragiles psychologiquement, à la périphérie.
Cette périphérie a fait l’objet de toutes les auscultations et publications sociologiques et intellectuelles possibles, pain aussi béni pour le politique que le fût le concept de « fracture sociale », creusant une faille plutôt que voué à consacrer la continuité entre le lieu de l’emprise légale et celui où le génie du Peuple est seul avec lui-même, rapport nu de la graine et du terreau fertile.
Le mystère de la transfiguration laïque y est supplanté par la sociologie triste et prétentieuse.
La banlieue, étymologiquement, est une périphérie, ceinture où le droit, l’urbain, sont livrés au génie du peuple. C’est la cour des miracles moderne.
C’est l’endroit même où, dans la République, plus qu’ailleurs, renaît l’espoir. Assigner la banlieue à un narratif clos, à une prison de ressentis, porte atteinte à cette fonction vitale, car éminemment regénératrice.
Accepter ce récit, l’intellectualiser aux quatre vents pour en faire un matériau non pas de travail sur la tranquillité publique, mais un outil de stigmatisation et de dissession politique, c’est étouffer le génie de la cour des miracles qui a sauvé tant de belles âmes dans la légende des siècles française.
Si on s’inscrit, non plus dans le narratif des ressentis, mais dans logique qui en anime l’emploi cynique, alors on comprend la saturation des faux points d’affects dans géographie du « Comprendre ».
Ce type de communication, sous ses airs compatissants — “Qu’est-ce que ça doit être flippant… Courage aux sinistrés ! — agit en réalité comme un cheval de Troie affectif.
En apparence, elle manifeste une empathie légitime, une émotion spontanée face à la catastrophe. Mais en coulisse, elle active des ressorts bien plus troubles : elle prépare une cristallisation émotionnelle qui peut être dirigée, orientée, exploitée.
Un canon à ondes électro-cognitives vise la perception collective. Il ne détruit rien de matériel. Il rend illisible, instable, insécurisée la conscience partagée de ce qui est réel.
Ensuite, il suffit de cesser de l’alimenter pour que la réalité semble redevenir naturelle, c’est-à-dire avec son lot d’incidents (le terme qui désigne disant lui-même le fait qu’il est en somme régulier): les fameux faits divers qui relèvent d’une société d’humains, qui ne peut tout à fait être parfaite.
L’axe des ressentis contre l’abscisse des ordonnées
Elle l’a toujours été. Elle s’est juste emballée parce qu’une force joue au plus fin pour faire tomber la République Française.
La dénaturer, c’est la faire tomber.
C’est assécher son idéal ramenée à la représentation d’honnêtes gens.
Quel nom donner à une opération d’intelligence extérieure qui s’appliquerait à encourager, par ce subtil modus operandi, le désordre qui favorise l’accession d’une force autoritaire au pouvoir, et qui couperait, une fois parvenue à cette fin, l’émission qui altère le ressenti, pour se prévaloir ensuite d’un retour à l’ordre, celui auquel le Peuple aspire, mais qui n’a vraiment jamais cessé, hors l’excitation du ressenti?
La larve Chrysopa (chaude) se nourrit de ce désordre, accélère l’embrasement.
Et au milieu… la larve cryogène,
inerte mais intacte,
silencieuse mais stratégique,
qui attend la chute du système immunitaire démocratique pour éclore.
> Référence au nom scientifique du « chrysoperla carnea », insecte dont la larve est invisible, douce en apparence, mais qui dévore ses proies de l’intérieur. Belle, fragile, infiltrante, elle prépare la prise, sans jamais l’assumer frontalement.
La bataille, d’ailleurs, sur le ressenti (vs le constat lucide, statistique notamment, fait rage, comme source de stigmatisation du pouvoir et non plus de sa légitimisation.
Le Rassemblement National s’y emploie. Et pour le moment, la population – s’en remettant jusqu’à plus ample informé, à ce qu’elle ressent en érant préalablement dûment désorientée-, penche du côté de ceux qui légitiment l’axe des ressentis plutôt que l’abscisse des ordonnées.
