Dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale, toutes les institutions françaises se trouvent aujourdâhui sous la pression des deux pĂŽles de lâactualitĂ© : la tension politique et la tension mĂ©diatique. Le SĂ©nat, Ă travers sa commission culturelle, met en cause la chaĂźne publique dans lâaffaire du col du Louvre ; lâAssemblĂ©e nationale, quant Ă elle, sâarroge le droit dâorienter la diplomatie du pays en votant une rĂ©solution contre lâaccord franco-algĂ©rien de 1968. Il se dĂ©gage de cet ensemble une atmosphĂšre de crise permanente et globale, oĂč chaque pouvoir semble sommĂ© de sâopposer Ă lâautre. Mais sur lâaffaire du traitĂ© France-AlgĂ©rie, la gravitĂ© franchit un seuil : câest le prĂ©sident de la RĂ©publique lui-mĂȘme qui se retrouve mis sur la sellette, dans des conditions qui ne sont ni acceptables au regard de la Constitution, ni responsables sur le plan diplomatique. Ni la France, ni lâAlgĂ©rie ne doivent se tromper sur la nature de ce qui se dĂ©roule sous nos yeux : ce nâest pas un simple dĂ©bat de politique Ă©trangĂšre, mais une tentative de dĂ©stabilisation de lâĂ©quilibre institutionnel et de la parole souveraine de lâĂtat.
Ce qui est « historique » dans le vote du 29 octobre 2025, ce nâest pas quâun texte portĂ© par le Rassemblement National ait Ă©tĂ© adoptĂ© pour la premiĂšre fois, mais bien le coup de canif portĂ© Ă lâordre institutionnel.
Sous couvert de souverainetĂ© parlementaire, lâAssemblĂ©e nationale a introduit, hors agenda et sans concertation prĂ©alable, une rĂ©solution qui place le chef de lâĂtat â seul habilitĂ© Ă modifier ou dĂ©noncer un traitĂ© international â dans une position de subordination symbolique.
Le piĂšge est redoutable :
đ Sâil applique la rĂ©solution, Emmanuel Macron endosse, malgrĂ© lui, le diktat de lâAssemblĂ©e, avec pour corollaire la dĂ©gradation prĂ©visible des relations franco-algĂ©riennes et une atteinte Ă la prĂ©rogative diplomatique de lâexĂ©cutif.
đ Sâil ne la suit pas, il ouvre la voie Ă une offensive politique dâampleur, conçue pour provoquer lâindignation de lâopinion et placer sa dĂ©mission dans la ligne de mire.
Cette manĆuvre, dissimulĂ©e derriĂšre un vote prĂ©tendument « historique », recompose les rapports de force au sommet de lâĂtat et affaiblit lâautoritĂ© de la fonction prĂ©sidentielle dans son domaine rĂ©servĂ© : la conduite des affaires Ă©trangĂšres.
Quâaucun constitutionnaliste, ni chroniqueur politique, nâait dĂ©noncĂ© cette torsion majeure de lâĂ©quilibre rĂ©publicain rĂ©vĂšle un silence inquiĂ©tant.
On ne joue pas impunément avec les fondements de la Ve République.
